Être heureux est possible : épisode • 3/4 du podcast L’épicurisme, une pensée qui nous veut du bien

Le calcul des plaisirs est un principe fondamental de l'épicurisme ©Getty - the_burtons
Le calcul des plaisirs est un principe fondamental de l'épicurisme ©Getty - the_burtons
Le calcul des plaisirs est un principe fondamental de l'épicurisme ©Getty - the_burtons
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On pense souvent que les épicuriens nous incitent à répondre à tous nos plaisirs afin d'être heureux. Toutefois, il s'agit bien d'une pensée qui prône la mesure. Comment être heureux en limitant nos plaisirs ?

Avec
  • Pierre-Marie Morel Professeur d'Histoire de la philosophie ancienne à l'Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
  • Giulia Scalas chercheuse associée au Centre Léon Robin

Avec philosophie consacre cette série d'émissions à la philosophie épicurienne. Dans ce troisième épisode, Géraldine Muhlmann et ses invités nous montrent qu'il est possible d'être heureux avec les épicuriens et que leur philosophie n'est en rien une pensée de la démesure.

Le plaisir comme absence de trouble

Contrairement à une idée reçue largement véhiculée, la pensée épicurienne est une philosophie de la mesure. Ainsi, le bonheur est défini avant tout par le négatif. Giulia Scalas explique : “pour Epicure, c’est l'absence de douleur qui constitue le bonheur”. Le bonheur est donc fondé sur l'"ataraxie".

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Néanmoins, il ne s'agit pas de rester dans un état de pure passivité. Pour Pierre-Marie Morel,il y a une ambivalence ici du négatif et du positif dans la caractérisation du plaisir”. Il s’agit bien de se tourner vers les bonnes activités, et donc d'agir.

Avec philosophie
59 min

Un équilibre à trouver

Les épicuriens nous invitent en effet à faire preuve de prudence. Pour Giulia Scalas, il faut “distinguer les désirs et les hiérarchiser”. Il s’agit également de s’interroger sur les moyens nécessaires pour satisfaire nos désirs, “puisqu’il y a des moyens qui peuvent être plus dangereux et nous faire souffrir plus que le manque”. Enfin, il faut également être conscients qu’il y a des souffrances qui peuvent avoir des résultats positifs. Il s’agit ainsi d’un véritable “calcul savant”, indique Giulia Scalas.

C’est d’ailleurs dans cet usage de la raison, qui permet de nous imposer des limites, que peut se trouver le plaisir : “c’est aussi une forme de jouissance” commente Pierre-Marie Morel. La limite est ainsi conçue comme “une puissance supplémentaire, parce que ce qui est limité, c'est ce qui est mieux déterminé, plus intelligible, plus clair pour nous”.

Désir sexuel ou passion amoureuse ?

Entre répondre à nos désirs sexuels ou tomber dans une passion amoureuse, les épicuriens nous conseillent de nous limiter aux désirs sexuels. Giulia Scalas indique que pour ces philosophes, “l’amour, entendu comme passion amoureuse, n’est pas un besoin naturel”, contrairement aux désirs sexuels. Pierre-Marie Morel ajoute : “ Epicure disait qu’il fallait se méfier de l’amour qui apporte généralement plus de problèmes que de satisfactions”.

Ces philosophes de l'Antiquité savaient donc bien que l’amour pouvait entrainer des souffrances. D'ailleurs, les épicuriens ne nient pas les douleurs que peuvent provoquer les différentes épreuves de la vie. Si l’épicurisme peut être considéré comme étant une “médecine de l’âme, c’est précisément parce que nous souffrons” analyse Pierre-Marie Morel.

🎧 L'émission est à écouter dans son entièreté en cliquant sur le haut de la page.

Pour en parler

Giulia Scalas, Chercheuse associée au Centre Léon Robin (sous la tutelle du CNRS et de Sorbonne Université). Cette année, elle est chargée de cours à l’ICP (Institut Catholique de Paris). Elle est l'autrice de :

Pierre-Marie Morel, Professeur d’Histoire de la Philosophie à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, Directeur du centre GRAMATA (Groupe de Recherches Antiquité, Moyen-Âge, Transmission Arabe - UMR 7219 Sphere). Spécialiste d’Aristote et de l’atomisme antique, il a traduit Epicure en GF-Flammarion (Lettre à Ménécée en 2009, et Lettres, maximes et autres textes en 2011) et participé au volume de la Pléiade Les Epicuriens (Gallimard, 2010). Parmi ses nombreux ouvrages on trouve :

Références sonores

  • Extrait du film La Grande Bouffe, réalisé par Marco Ferreri, sorti en 1973.
  • Lecture par Riyad Cairat d'un extrait d'Epicure, Lettre à Ménécée, (traduction de P.-M. Morel, in Épicure, Lettres, maximes et autres textes, Introduction, traduction, dossier et notes, GF-Flammarion, 2011, 129-130).
  • Lecture par Riyad Cairat d'un extrait d'Epicure, Lettre à Ménécée, (traduction de P.-M. Morel, in Épicure, Lettres, maximes et autres textes , Introduction, traduction, dossier et notes, GF-Flammarion, 2011, 131-132).
  • Extrait du film Charlie et la Chocolaterie, réalisé par Tim Burton, sorti en 2005.
  • Lecture par Carla Michel d'un extrait de Lucrèce, De la nature (De rerum natura), “Hymne à Vénus”, chant I, vers 17 à 25, (traduction de José Kany-Turpin, GF Flammarion, 2021).
  • Lecture par Carla Michel d'un extrait de Plutarque, “Si l’on se conforme à Epicure, il n’est même pas possible de vivre plaisamment”, dans Les Epicuriens, Gallimard, “Bibliothèque de la Pléiade”, 2010, p. 895-896.
  • Extrait du film Trainspotting, réalisé par Danny Boyle, sorti en 1996.
  • Chanson de fin : “Des attractions désastre”, d'Etienne Daho, dans l’album Paris Ailleurs (1991).
  • Musique de notre nouveau générique : "Sabali" d'Amadou et Mariam.

Le Pourquoi du comment, la chronique de Frédéric Worms

Retrouvez la chronique de Frédéric Worms sur la diversité  ici.

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