La Lettre de l'ISJPS n° 18 | Environnement et développement durable

L'Institut des sciences juridique et philosophique de la Sorbonne est une unité mixte de recherche pluridisciplinaire réunissant juristes et philosophes. Il développe une réflexion transversale sur le devenir des normes et des catégories face aux défis du monde contemporain. La Lettre de l’ISJPS porte tous les deux mois un regard approfondi sur les activités de recherche de l’UMR.

Engagé dans la réflexion et l'action relatives au dérèglement climatique tant par les thématiques de ses travaux de recherche (droit et philosophie de l'environnement) que par la constitution de son "comité développement durable", l’ISJPS a mis en œuvre ses principes en établissant son Bilan GES pour l’année 2022. Ce bilan va lui permettre d'organiser un plan de transition vers le "bas-carbone".

La Collection de l'ISJPS (éditions Mare & Martin) publie par ailleurs de nombreux ouvrages traitant des enjeux juridiques du changement climatique.

Enfin, l'ISJPS est heureux d'accueillir Paul Guillibert, chargé de recherche CNRS et philosophe de la nature.

Le Bilan GES de l'ISJPS

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Entretien avec Mathilde Françaix

Doctorante en droit de l'environnement à l'ISJPS

L’ISJPS a confié à Mathilde Françaix, doctorante en droit de l'environnement et alors stagiaire à l’ISJPS, la mission de déterminer les quantités de gaz à effet de serre (GES) émises par les différentes activités du laboratoire au cours de l'année 2022. 

1. Dans quel contexte avez-vous établi ce bilan ?

Ma mission prend tout d’abord place dans le contexte général du dérèglement climatique, dont la société commence à prendre réellement conscience, en particulier la Fonction publique et, au sein de cette dernière, les acteurs de la recherche. Ainsi, le CNRS a créé le groupe de recherche Labos 1point5, qui développe des outils de mesure et de prise de décision relatives à l’impact environnemental des structures de recherche françaises.

L’ISJPS s’est quant à lui doté d’un "comité développement durable", composé de Marta Torre-Schaub (référente), Marie-Xavière Catto et Sophie Guy et dont la première mission lui a été confiée à titre de dispositif expérimental par l'université Paris 1 Panthéon-Sorbonne : établir le bilan gaz à effet de serre (GES) 2022 de l’ISJPS. C’est en tant que stagiaire à l’ISJPS que j’ai été chargée de cette mission.

2. Pourquoi établir un tel bilan ?

La Vice-présidence Recherche de l’université a demandé à l’ISJPS d’établir ce bilan pour servir de banc d’essai pour les autres composantes de l’université et avoir une vision de ce qui peut être amélioré à l’échelle d’une unité de recherche. Généraliser ce type de bilan permettra par ailleurs de renforcer la prise de conscience des acteurs de la recherche de leur impact environnemental et d’ainsi inciter les agents à réduire cet impact lorsque c’est possible. Une comparaison avec les années suivantes, une fois les actions mises en place, sera également possible(1).

3. Comment avez-vous procédé pour établir le bilan GES de l’ISJPS ?

J’ai suivi le protocole proposé par le GdR Labos 1point5. 

J’ai tout d’abord identifié les principaux postes d’émission de GES de l’unité (bâtiments, achats, déplacements). La Direction du patrimoine de l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne et le service Comptabilité de l’ISJPS m’ont fourni les données nécessaires.

Deux outils m’ont ensuite permis de mesurer les émissions : d’une part l’outil de calcul du GdR Labos 1point5 dans lequel sont saisies les données(2). D’autre part un questionnaire adressé à l’ensemble des membres de l’unité.

Les résultats permettent d’identifier les postes sur lesquels une action est possible en vue de diminuer les émissions de GES et de soumettre des propositions en ce sens, qui seront étudiées en Conseil d’unité.

(1) Les deux tutelles de l'ISJPS, l'université Paris 1 Panthéon-Sorbonne et le CNRS, ont engagé des démarches similaires : des Assises du développement durable pour l'université, un plan pour le CNRS.

(2) Environ 85 % des unités CNRS qui ont établi leur bilan GES ont utilisé cet outil, ce qui permet une comparaison fiable et une uniformisation des résultats.

Consulter le Bilan GES de l'ISJPS

Publications droit et environnement

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La Collection de l'ISJPS (éditions Mare & Martin) accueille les productions scientifiques des membres de l’ISJPS tant en droit qu’en philosophie, notamment sur les enjeux du dérèglement climatique.

C'est ainsi qu'un Dictionnaire juridique du changement climatique a été publié en 2022 sous la direction de Marta Torre-Schaub, Aglaé Jézéquel, Blanche Lormeteau et Agnès Michelot et est devenu, avec plus de 200 entrées, une référence en la matière.

L'année précédente paraissait, sous la direction de Marie-Anne Cohendet, Droit constitutionnel de l'environnement, qui interroge l’organisation des institutions pour répondre à l’urgence climatique et à la dégradation massive de la biodiversité.

Le dernier-né de la Collection de l'ISJPS, Les risques climatiques à l’épreuve du droit (dirigé par Marta Torre-Schaub, Anne Stevignon et Blanche Lormeteau), explore l’appréhension juridique d’un nouveau concept : le "risque de transition".

Un philosophe de la nature à l'ISJPS

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Paul Guillibert

Chargé de recherche CNRS en philosophie de l'environnement à l'ISJPS

L'ISJPS est heureux d'accueillir parmi ses membres Paul Guillibert, chargé de recherche CNRS en philosophie de l’environnement.

Ses recherches doctorales et post-doctorales proposaient de relire l’historiographie marxiste du capitalisme à partir des problèmes soulevés par la catastrophe écologique. Loin d’y découvrir une pensée écologiste systématique ou, au contraire, le parangon du productivisme, il a éclairé les tensions et les contradictions qui traversent la philosophie écologique de la pensée marxiste. Relisant des auteurs centraux ou hétérodoxes (Karl Marx, Raymond Williams, José Carlos Mariàtegui, Ernst Bloch), il a montré que la question environnementale y était toujours formulée dans le cadre d’une critique de l’économie politique. En ce sens les modes de relation à la nature y sont toujours appréhendés à partir des conflits pour les usages et l’appropriation de la terre.

Après avoir étudié les rapports entre propriété de la terre et écocide dans le marxisme, ses recherches actuelles développent une philosophie sociale et politique du vivant. Il enquête sur les formes de la réflexivité environnementale dans le droit de la propriété intellectuelle encadrant les biotechnologies. Son projet de recherche porte plus précisément sur les définitions de la nature mobilisées dans les controverses du droit de la propriété intellectuelle et sur la philosophie de la propriété dont est solidaire le développement de la brevetabilité du vivant. Enfin, il cherche à montrer les implications pour la théorie sociale de la trajectoire historique d’un biocapitalisme contemporain qui intensifie, jusqu’à l’épuisement, les puissances d’engendrement de la nature. 

À l’heure du changement climatique, les philosophies de la nature articulent nécessairement des dimensions de philosophie sociale et politique, de l’histoire et du droit. La réflexion sur les modes de connaissance et les formes d’apparition des naturalités est ainsi inséparable de l’étude des rapports sociaux qui bouleversent les équilibres de la biosphère et les conditions d’habitabilité de la terre.

Pour aller plus loin

Dossier "Marxismes écologiques", coordonné avec Stéphane Haber, Actuel Marx, 2017/1, n°61

Terre et capital. Pour un communisme du vivant, Amsterdam, Paris, 2021

"Personnaliser la nature, un “devenir-animiste’’ du droit moderne ?", Revue Lexsociété, 2022

Exploiter les vivants. Une écologie politique du travail, Amsterdam, Paris, 2023

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